Cela ne faisait que quelques jours que j'étais de retour à Aiden. J'avais envoyé un texto à Yang et Meredith pour leur annoncer mon retour. La réaction de Yang m'avait quelque peu refroidie, mais je ne pouvais pas lui en tenir rigueur. J'étais la seule fautive dans l'histoire. J'étais partie du jour au lendemain, sans vraiment donner de raisons, justes mes papiers du divorce. Elles avaient surement dû en payer les pots cassés avec Alex. Je me tenais face à l'hôpital, comme je m'étais déjà retrouvé des dizaines de fois sauf que cette fois, c'était différent. Deux années s'étaient écoulées. Deux longues années. Mes mains avaient oubliés la chirurgie pour se consacrer à faire la plonge dans un bar miteux d'une petite ville à trois heures d'Aiden. J'étais terrorisée à l'idée de rentrer dans ce hall et affronter les regards de mes anciens collègues. Si ma vie s'était arrêté deux ans plus tôt, leur vie à eux avaient belle et bien continué. J'avais appris qu'un nouveau chef était à la tête de l'hôpital désormais et que ma réintégration serait sans doute plus compliqué qu'avec Weber, mais peu importe ce n'était pas cela qui allait m'arrêter. J'étais désormais dans le hall, guettant la moindre tête connue. Je reconnus quelques infirmières au loin à qui j'adressai un bref signe de la main. Leur regard interloqué me mettait d'autant plus mal à l'aise. Je connaissais cet hôpital dans ces moindres recoins et le fait d'y revenir me bouleversait. J'allais monter au quatrième étage, voir ce Owen Hunt et reprendre ma vie-là où je l'avais laissée. Alors que je frottais mes mains moites et bougeais mes jambes nerveusement, l'ascenseur s'ouvrit. Il était là. Alex était là, tête baissée. Mon Dieu que devais-je faire ? Je me raclai la gorge et lui lançai un bref : " Salut..." La personne que je redoutais le plus de croiser se tenait face à moi. J'étais à la limite de m'écrouler. Mon regard vint se poser sur mes pieds qui étaient dans l'incapacité de bouger. À cet instant, mon retour à Aiden me parut l'idée la plus absurde que j'avais eue ces dernières années après celle de mon divorce. Comment avais-je pu m'imaginer une seconde que j'allais pouvoir le récupérer ? Après tout ce que je lui avais fait ? Je redoutais sa réaction... Je le connaissais par cœur et savais comment parfois Alex pouvait réagir violemment.

C’était une journée comme les autres, du moins c’est ce que je pensais. L’état de santé mental et physique d’une de mes « patientes » me tracassait énormément. Daenerys était venue il y a quelques jours pour une très moche blessure au bras. J’avais tout de suite deviné qu’elle avait fait une tentative de suicide. Mais impossible de la raisonner pour qu’elle rencontre le psychiatre de garde. J’avais fini, contrairement à mon habitude, par céder à ses bons vouloirs. Elle était finalement rentrée chez elle en me promettant de faire attention à sa blessure. Mais voilà, elle était revenue ce matin. Cette blessure s’était infectée. Après l’avoir soignée, je m’étais débrouillé pour qu’elle reste en pédiatrie pour au moins une nuit. J’allais alors au bureau d’accueil pour indiquer son admission. Je descendais de deux étages par l’ascenseur. Je comptais passer voir Josephine afin de lui déposer un petit baiser sur le front discrètement. Elle avait l’art de me remettre d’aplomb lorsque quelque chose me tracassait. La jeune fille et moi étions … ensemble. Enfin, du moins, c’est comme cela que je la considérais. Elle était en couple avec moi. Oui, c’est ça … Nous formions un couple. Oh, certaines mauvaises langues vous diront qu’elle n’est avec moi juste pour avoir de chouettes opérations. Mais ça, ce sont les mauvaises langues. Josephine n’était pas comme ça. Elle semblait m’apprécier. Nous vivions sous le même toit, dans l’ancienne maison de Meredith. J’y logeais avec d’autres internes. Mais c’était ma maison et je pouvais les mettre dehors quand je le voulais. J’étais complètement perdu dans mes pensées, assez bien de choses défilaient dans ma tête. C’est alors que l’ascenseur s’arrêta à l’étage intermédiaire. Et là, j’eus un bug. Je croyais voir une fille revenir d’entre les morts. C’était Izzie. Oui, Izzie, mon ex – femme. Mais je ne voulais pas lui montrer ma faiblesse, je n’étais pas quelqu’un comme ça. « Qu’est – ce que tu fous là ? ». Oh, je n’avais pas hurlé mais je n’avais pas parlé doucement non plus. Mon ton de voix se trouvait entre ces deux nuances. On pouvait lire sur mon visage de l’incompréhension mais aussi et surtout de la colère. C’est alors que j’arrivais à l’étage qui était le mien. « Je te laisse, je dois aller m’occuper de patients qui ne disparaissent pas du jour au lendemain sans rien dire, eux ! ». Et je reprenais ma route vers l’accueil pour signaler les admissions, ne croyant pas ce que je venais de voir.

Après la merveilleuse phrase que je venais de sortir, je m’étais dirigé vers le bureau des admissions. Izzie m’avait courrue après. Il faut dire que j’avais marché le plus vite possible histoire qu’elle ne puisse pas me rattraper. Mais c’était sans compter sur l’acharnement de la belle blonde. C’était alors qu’elle me rattrapa en m’attrapant par le bras. Et là, je n’eus qu’une seule pensée : espérer que Joséphine n’était pas dans les parages pour voir la scène. Là, ce serait le comble. Je serai complètement incapable de me défendre. J’enlevais rapidement mon bras, je ne voulais pas de contact physique avec elle. Nous n’étions plus ensemble, nous ne formions pas un couple. Elle n’était plus rien pour moi. Enfin cela, c’est ce que j’essayais de me convaincre. Izzie avait été une partie de ma vie et elle le serait toujours. Je tenais beaucoup à elle finalement. Mais elle m’avait laissée tomber comme une vieille chaussette, elle avait pris la fuite plutôt que de me parler. Et ça, je ne le lui pardonnerais jamais. « Lâche – moi ! ». Cette fois – ci, je parlais de façon agressive mais sur un ton bas pour que personne n’entende ce que je disais. Je n’avais pas envie que tout l’hôpital soit au courant de ma vie privée et encore moins que Joséphine soit au courant de ce qu’il se passait avant même que je ne puisse le lui raconter. Je la pris donc à mon tour par le bras pour se rendre dans une salle de repos où personne n’aurait d’yeux rivés sur nous. « Izzie, tu reviens et tu t’attends à quoi ? Que je t’accueille en te sautant dans les bras ? ». Je repris ma respiration. Je ne voulais pas m’éterniser, j’avais vraiment du travail. Et puis, de toute façon, je n’avais pas envie de m’éterniser. Elle ne le méritait pas. Je parlais directement, sans lui laisser le temps de me répondre. « Parce que maintenant, tu vas m’attendre ? Tu n’auras pas disparu d’ici – là ? ». Je n’avais plus confiance en elle. Et je ne pourrais certainement plus jamais lui faire confiance. De nouveau, elle n’eut pas le temps de me répondre que j’enchainais directement. « Et puis, de quoi veux – tu parler, hein ? ». Mon ton montait de plus en plus. Nous étions éloignés d’autres personnes, rien ne pouvait sortir de cette pièce. « Et puis, j’ai pas envie de te parler. J’ai refais ma vie, Izzie. Je me suis habitué au fait que tu sois partie. Et figure – toi que je vis très bien sans toi ! ». Là, je venais très certainement de mentir. Je ne m’étais jamais vraiment habitué à son départ. Et elle avait fait des dégâts, j’avais arrêté de croire en l’amour. Je me disais que dès qu’elle en aurait l’occasion, la fille avec qui je me sentais bien aurait pris la fuite. Finalement, tout cela était de sa faute. Mais je m’étais efforcé de voir le bon côté des choses. C’est grâce à elle, parce qu’elle était partie, que je suis ce que je suis aujourd’hui… Je m’apprêtais alors à sortir de la pièce, je reprenais mes esprits quelques secondes. Il était hors de question que j’aille voir les enfants avec cette tête – là mais surtout dans cet état psychologique. J’étais nerveux, stressé. Je pouvais rapidement perdre les pédales. Je m’efforçais à faire un travail sur moi – même.